Exercices tactiques 04 (par Jean Meunier-Pion)

Problèmes tactiques

N° 4

Si tu veux te creuser les méninges sur des problèmes qui se laisseront difficilement saisir, voici une petite sélection qui te fera plaisir.

La planche d’exercices est composée de 7 problèmes retors, aux différents ressorts.

Le niveau de difficulté augmente au fur et à mesure, alors ne perds pas d’allure.

Note : l’orientation de l’échiquier est toujours du côté du camp au trait.

Problème 1

La paire de Fous braque son regard sur le Roi noir. Comment en profites-tu pour mater en 3 coups ?

Problème 2

Le Roi noir est dans une boîte. Il faut que tu le mates en deux coups.

Problème 3

J’ai rencontré ce problème sur chess.com. C’est une finale de pions avec deux pions de moins, mais le Roi noir est coincé. Comment gagnes-tu ?

Problème 4

Après le début de partie écossais suivant : 1.e4 e5 2.Cf3 Cc6 3.d4 exd4 4.Cxd4 Cf6 5.Cxc6 bxc6 6.De2 De7 7.Cc3 h6 8.Fd2 Tb8 9.0-0-0, comment finis-tu la partie avec les Noirs ?

Problème 5

Le Roi noir s’est retrouvé sur la bande, comment le mets-tu à l’amende ? Mat en 3.

Source : Charles Pelle, Le Problème 2ème Prix

Problème 6

Lors de mon premier Titled Tuesday, je me suis retrouvé dans cette position avec les Noirs. J’ai senti que le moment était critique, mais je n’ai pas opté pour la bonne solution. Ici, comment joues-tu pour rester dans la partie ?

Problème 7

Pour bien finir, voici un mat en 2 à l’aveugle. La disposition des pièces est la suivante :

Blancs : Rg7, Dh3, Td2, Fb6

Noirs : Re8, Cb8, Ch8, Fh7, d7, e7

Tu as les Blancs, à toi de trouver la clef.

Source : Eduard Adamski

 

Culture échiquéenne

Après avoir traité tous ces problèmes difficiles, je te propose des questions plus faciles. Ce sont des questions de culture, que ce soit d’ordre technique, historique, ou au sujet des ouvertures.

La question technique :  Qu’est-ce qu’un armageddon aux échecs ?

La question historique : Qui est la première femme à avoir obtenu le titre de GMI ?

La question ouverture : Quel est le nom de l’ouverture dans laquelle les Noirs peuvent mater en 8 coups après 1.d4 Cf6 2.c4 e5 3.dxe5 Cg4 4.Ff4 Cc6 5.Cf3 Fb4+ 6.Cbd2 De7 7.a3 Cgxe5 8.axb4, et comment matent-ils ?

Jean Meunier-Pion

*  *  *

Solutions exercices tactiques N° 3

Que tu penses avoir trouvé la solution à un problème ou que tu t’arraches les cheveux depuis des jours sur une position, c’est ici que tous les mystères te seront révélés. 

Mais avant d’aller regarder plus loin, es-tu sûr d’avoir bien réfléchi sur le problème dont tu vas regarder la solution ? Une fois la solution dévoilée, tu n’auras plus de deuxième chance pour connaître la satisfaction que l’on ressent en perçant les mystères d’une énigme pour la première fois.

Aussi, petit conseil avant que tu ne consultes les solutions : quand tu lis des variantes, il ne faut pas être passif et juste regarder les coups. S’il y a une variante que tu n’avais pas vue ou que tu avais rejetée, il faut que tu comprennes chacun de ses coups et que tu la remettes en question en proposant tes propres lignes, jusqu’à ce que ce que tu réalises pourquoi elle fonctionne effectivement. Bien souvent, ce sont les sous-variantes que l’on calcule et qui n’apparaîtront jamais sur l’échiquier qui font la richesse de la ligne principale.

Problème 1

Pour que le Roi ne ralentisse pas l’escalier des Tours, il faut l’envoyer au coin en jouant 1.Rh1!. Les Noirs n’ont pas de coup intéressant. Ils peuvent jouer par exemple 1…Rg7 2.Tg1+ Rh6 3.Th2# et c’est un mat en 3.

Problème 2

Sur 1.Fa2+, le Roi s’échappe par h7.

Sinon, mettre le Fou sur les cases c2, d3, e4 ou encore f5 ne permet pas de mater en 3 car les Noirs peuvent jouer 1…g6 ou 1…g5 et ainsi libérer la case g7.

L’essai 1.Ta8 se heurte également à 1…g6 et 1…g5 (ou aussi à 1…f1=D ou 1…f1=T).

Pour éviter ces désagréments, le coup naturel est alors 1.Fg6 qui bloque le pion. Si 1…Rh8, 2.Th1+ Rg8 3.Ff7#. Et dans le cas où les Noirs décident de faire promotion, il y a aussi mat en 3 : 1… f1=D 2.Txf1 Rh8 Rf8#.

Problème 3

Si l’on retire le Cavalier, on menacera mat en g8. La seule manière de défendre pour les Noirs sera alors de mettre le Cavalier en g5 pour faire obstruction. Après cela, il faut voir si l’on peut mater.

En l’occurrence, en jouant 1.Cf5!, on parvient à mater en 5.

1… Cg3 est un essai très intéressant car l’on ne peut pas prendre le Cavalier sous peine de pater. En revanche, un petit coup d’attente comme 2.Tg1 force le Cavalier à rebouger puis rien ne peut empêcher 3.Tg8#.

1… Cg5+ est l’essai le plus consistant. 2.Txg5 hxg5 3.Ch6! g4 4.Rf8 g3 5.Cf7#

Enfin, sur un essai comme 1… Cf6, on peut jouer le très fort 2.Tg7 et 3.Tg8# est imparable. Et sur 1…Cd6+, 2.Rf8 suffit et 3.Tg8# suivra.

Problème 4

On pourrait encore mater en 5 comme dans le diagramme précédent, mais ici on veut faire mieux. En l’occurrence, en jouant 1.Cge6 (menace 2.Tg8#) Cg5+ (sur 1…Cf6, 2.Tg7 puis 3.Tg8# ; sur 1…Cg3, 2.Tg1 puis 3.Tg8#) 2.Txg5 hxg5 3.Cxg5 h6 4.Cg6#, on parvient à mater en 4 coups.

Problème 5

Ce mat en 4 est un véritable casse-tête dans lequel il faut faire coulisser correctement les Tours.

La solution commence par 1.Td8. Le Roi noir est bloqué car en cas de 1… Rc6, 2.Tc4# sonne son glas.

Il n’y a donc que deux coups.

En cas de 1… h5, 2.T4d4 b3 3.Rb7, suivi de 4.T8d5# fait l’affaire.

Sinon, sur 1… b3 2.Ta4 b2 3.T8d4 b1=D 4.Tac4#.

Problème 6

Il s’agit d’un des pièges de Tarrasch.

Siegbert Tarrasch a gagné deux parties, face à Zukertort en 1887 et face à Gunsberg en 1890, grâce à ce début de partie.

Les premiers coups sont 1.e4 e5 2.Cf3 Cc6 3.Fb5 a6 4.Fa4 Cf6 5.0-0 Cxe4 6.d4 b5 7.Fb3 d5 8.dxe5 Fe6 9.c3 Fe7 10.Te1 0-0 11.Cd4 Dd7.

Arrivé dans cette position, on se rend compte que la Dame noire est mal placée.

12.Cxe6 permet d’en profiter. Si 12… Dxe6, 13.Txe4 et d5 est cloué par le Fou.

Si 12… fxe6, 13.Txe4 et la Dame cloue d5.

Problème 7

Pour commencer, il y a 6 x 2 + 8 x 4 + 7 x 1 = 51 manières de placer le Roi sur les rangées allant de 8 à 2. Pour chacune de ces manières de placer le Roi, il y a 64 – 4 = 60 façons de positionner la Tour blanche. Il y a donc 51 x 60 = 3060 façons de placer le Roi et la Tour, lorsque le Roi est sur les rangées allant de 8 à 2. Enfin, lorsque l’on place le Roi sur la première rangée, il faut que la Tour s’interpose entre lui et la Tour noire, puisque le trait est aux Noirs, et que le Roi blanc ne peut donc pas être en échec. Il y a donc 6 + 5 + 4 + 3 + 2 + 1 = 21 façons de placer le Roi et la Tour blancs sur la première rangée. Conclusion : il y a 3081 manières différentes de placer une Tour et un Roi blancs dans cette position, lorsque le trait est aux Noirs.

À présent, la question qui nous intéresse vraiment est celle qui suit : dans quelles configurations y a-t-il nulle ? C’est une question qui vise à vérifier ta connaissance des finales de Tours.

Tout d’abord, on va compter le nombre de configurations qui gagnent avec les Blancs. Pour gagner, c’est simple, il faut que le Roi soit au contact de la Tour noire et que la Tour blanche donne un échec au Roi noir. De la sorte, les Noirs seront forcés de bouger leur Roi, et le Roi blanc mangera la Tour au coup suivant. Il faut donc placer le Roi en b2, et la Tour blanche doit se trouver sur l’une des cases suivantes : h5, h4, h3, h2, e8, d8, c8, b8, a8. Je te laisse le soin de vérifier pourquoi mettre la Tour en f8 ou en h6 (et même en h1 d’ailleurs) ne fonctionnerait pas. Il y a encore d’autres configurations à considérer : celles où il y a mat. Ces configurations arrivent lorsque le Roi est en h6, g6, f7, ou f8, et la Tour sur la huitième rangée ou sur la colonne h. En tout, il y a donc 9 configurations où l’on gagne la Tour noire et 22 configurations où l’on mate le Roi noir. Donc il y a 31 configurations gagnantes.

On voit qu’il y a très peu de configurations qui permettent aux Blancs de gagner. Maintenant, à ton avis, qu’est-ce qui va être le plus simple à compter ? Le nombre de positions perdantes ou le nombre de positions qui font nulle ?

La bonne réponse est « le nombre de positions qui font nulle ». En fait, dans cette position thématique des finales de Tours, pour faire nulle avec les Blancs, il n’y a pas beaucoup d’options sur le placement du Roi pour éviter un échec de la Tour noire qui libérerait la place pour le pion. Par exemple : si le Roi blanc est en h3, 1…Th1+ suivi de 2…a1=D gagnerait. De plus, être sur la deuxième rangée n’est pas toujours suffisant pour éviter que la Tour se libère. Par exemple, si le Roi est en f2, les Noirs peuvent jouer 1…Th1! et, même si les Blancs avaient leur Tour positionnée de telle sorte qu’ils puissent jouer 2.Txa2, les Noirs auraient une enfilade par 1…Th2+.

Je t’invite à essayer de placer différentes positions sur l’échiquier et à chercher les meilleurs coups pour les deux camps. En attendant, je vais lister les configurations faisant nulle :

Défense classique avec Roi proche des cases h2/g2 :

Les cases h2 et g2 sont les cases-clefs qui permettent de faire nulle facilement lorsque le Roi s’y trouve.

  • Rh2 ou Rg2 et la Tour sur l’une des cases suivantes : h3/h4/h5/h6/f8/e8/d8/c8/b8/a8/a7/a6/a5/a4/a3. (2 x 15 = 30 possibilités)
  • Rh3 ou Rg3 et Ta8. (2 possibilités)
  • Rf2 et Ta8. (1 possibilité)
  • Rf3 et Ta8. (1 possibilité)
  • 30 + 2 + 1 + 1 = 34 possibilités dans cette catégorie.

Roi proche du pion :

Si le Roi se trouve très près du pion, il peut l’attraper et faire nulle rapidement.

  • Rb2 et la Tour sur l’une des cases suivantes : de g2 à c2, de g3 à a3, de g4 à a4, de g5 à a5, de h6 à a6, de h7 à a7, de g8 à f8. (5 + 7 + 7 + 7 + 8 + 8 + 2 = 44 possibilités)
  • Ra3 et la Tour sur l’une des cases suivantes : de h2 à b2, de h3 à b3, de h4 à a4, de h5 à a5, de h6 à a6, de f7 à a7 sauf en b7(!), de f8 à a8. (7 + 7 + 8 + 8 + 8 + 5 = 43 possibilités)
  • Rb3 et la Tour sur l’une des cases suivantes : de h2 à b2, de h3 à c3 et en a3, de h4 à a4 sauf en b4(!), de h5 à a5 sauf en b5, de h6 à a6 sauf en b6, de f8 à a8. (7 + 7 + 7 + 7 + 7 + 6 = 41 possibilités)
  • Rc3 et la Tour sur l’une des cases suivantes : de h2 à h6, de f8 à a8, de a3 à a7, et en c2. (5 + 6 + 6 + 1= 18 possibilités)
  • Rc2 et la Tour sur l’une des cases suivantes : de h2 à h6, de f8 à a8, de a3 à a7, et en c2. (5 + 6 + 6 + 1 = 18 possibilités)
  • Rd2 ou Rd3 ou Rd4, et la Tour en a8. (3 possibilités) (NB : il existe d’autres placements de Tour qui font nulle avec ces positions de Roi. On les verra plus tard.)
  • Rc4 et la Tour sur l’une des cases suivantes : e8/d8/c8/a8/h2/h3/h4/h5 et en c2. (9 possibilités)
  • Rb4 et la Tour sur l’une des cases suivantes : e8/d8/c8/a8/h2/h3/h4/h5. (8 possibilités)
  • 44 + 43 + 41 + 18 + 18 + 3 + 9 + 8 = 184 possibilités dans cette catégorie.

Roi caché derrière le pion :

À part les cases h2 et g2, le Roi blanc peut se cacher sur la colonne a.

  • Ra8 et la Tour en a7/a6/a5/a4/a3. (5 possibilités)
  • Ra7 et la Tour en a6/a5/a4/a3. (4 possibilités)
  • Ra6 et la Tour en a5/a4/a3. (3 possibilités)
  • Ra5 et la Tour en a4/a3. (2 possibilités)
  • Ra4 et la Tour en a3. (1 possibilité)
  • 5 + 4 + 3 + 2 + 1 = 15 possibilités dans cette catégorie.

Roi caché derrière la Tour :

Une défense moins classique est de se cacher derrière la Tour.

  • Rc8 et Tc2. (1 possibilité)
  • Rc7/Rc6/Rc5 et Tc2/Th2. (6 possibilités)
  • Rd8 et Td2. (1 possibilité)
  • Rd7/Rd6/Rd5/Rd4/Rd3 et Td2/Th2. (10 possibilités)
  • Re8 et Te2. (1 possibilité)
  • Re7/Re6/Re5/Re4/Re3 et Te2/Th2. (10 possibilités)
  • Rf8/Rf7 et Tf2. (2 possibilités)
  • Rf6/Rf5/Rf4/Rf3 et Tf2/Th2. (8 possibilités)
  • Rg6/Rg5/Rg4/Rg3 et Tg2/Th2. (8 possibilités)
  • Rh6/Rh5/Rh4/Rh3 et Th2. (4 possibilités)
  • Et, enfin, une configuration un peu plus subtile : Rg2 et Th2. (1 possibilité)
  • 1 + 6 + 1 + 10 + 1 + 10 + 2 + 8 + 8 + 4 + 1 = 52 possibilités dans cette catégorie.

Bilan

Après cette énumération de toutes les configurations annulantes, l’on obtient qu’il existe 34 + 184 + 15 + 52 = 382 configurations qui font nulle.

C’est bien plus que ce que j’imaginais en créant ce problème!

Et finalement, par déduction, il existe 3081 – 31 – 382 = 2668 configurations qui perdent pour les Blancs. Autrement dit, les Blancs ont 1,01% de chance de gagner, 12,40% chances de faire nulle et 86,60% de chances de perdre en plaçant une Tour et un Roi au hasard. On comprend donc bien qu’il faille connaître ses schémas de défense en finale pour espérer obtenir des demi-points!

Note 1 : la somme des pourcentages dépasse 100% du fait des arrondis.

Note 2 : la solution proposée ici a été réalisée par ma personne et avec beaucoup d’attention, mais je n’ai toujours pas fait de double-vérification pour m’assurer que mon résultat était parfaitement exact. Si tu penses avoir vu une erreur dans ma solution, n’hésite pas à me le faire savoir!

Culture échiquéenne

Après avoir traité tous ces problèmes difficiles, je te propose des questions plus faciles. Ce sont des questions de culture, que ce soit d’ordre technique, historique, ou au sujet des ouvertures.

La question technique :  D’après le Livre de l’Arbitre de juillet 2021, « Le Buchholz est la somme des scores ajustés des adversaires d’un joueur. » En d’autres termes, lors d’un tournoi, le Buchholz d’un joueur est la somme des points de ses adversaires. Il faut ajuster ces points en ne comptant qu’un demi-point à chaque gain par forfait et à chaque exemption, et en comptant un demi-point à chaque défaite par forfait.

La question historique : La FIDE a adopté le système Elo en 1970. À l’époque, Bobby Fischer se hisse au sommet avec un classement de 2720. (source : https://www.olimpbase.org/Elo/Elo197000e.html)

La question ouverture : Cette variante porte les noms de variante Caméléon et de variante Chebanenko.

Jean Meunier-Pion

*  *  *