Exercices tactiques 06 (par Jean Meunier-Pion)

Solutions exercices tactiques N° 5

Que tu penses avoir trouvé la solution à un problème ou que tu t’arraches les cheveux depuis des jours sur une position, c’est ici que tous les mystères te seront révélés. 

Mais avant d’aller regarder plus loin, es-tu sûr d’avoir bien réfléchi sur le problème dont tu vas regarder la solution ? Une fois la solution dévoilée, tu n’auras plus de deuxième chance pour connaître la satisfaction que l’on ressent en perçant les mystères d’une énigme pour la première fois.

Aussi, petit conseil avant que tu ne consultes les solutions : quand tu lis des variantes, il ne faut pas être passif et juste regarder les coups. S’il y a une variante que tu n’avais pas vue ou que tu avais rejetée, il faut que tu comprennes chacun de ses coups et que tu la remettes en question en proposant tes propres lignes, jusqu’à ce que ce que tu réalises pourquoi elle fonctionne effectivement. Bien souvent, ce sont les sous-variantes que l’on calcule et qui n’apparaîtront jamais sur l’échiquier qui font la richesse de la ligne principale.

Problème 1

L’abri du Roi noir semble tenir et si c’était aux Noirs de jouer, ils pourraient attraper la nulle en jouant 1…Dc1+ et en harcelant le Roi blanc. Pourtant, il existe une brèche.

En jouant 1.Dg7+, on force la main et on dégage la ligne de tir du Fou a2. 1…Txg7 2.e7+ Rh8 3.e8=D+ (ou 3.e8=T+) Tg8 4.Dxg8#.

Si les Noirs tentent d’interposer quoi que ce soit en jouant par exemple 2…Dc4, 2…Fe6 ou 2…Tf7, 3.e8=D# finit instantanément.

Problème 2

Avec les Noirs, on a investi une Tour, deux pions et notre Roi risque d’être en danger. Il faut poursuivre l’attaque et finir la partie tout de suite en jouant 1…hxg3 qui menace de mater très rapidement en h2.

Les Blancs semblent avoir un peu de contre-jeu en jouant 2.Fxe7+.

Et, effectivement, si on joue naïvement 2…Rxe7, 3.Dc7+ permet aux Blancs de renverser la tendance. Interposer la Dame avec 3…Dd7 n’est pas envisageable car les Blancs ont une Tour de plus. Jouer 3…Rf8 ou 3…Re8 mènerait également à l’échange des Dames après 4.Dc8+. Enfin, 3…Rf6 autorise 4.Dxd6+ Rg7 5.Dxg3 et le sauvetage du Roi blanc est un succès.

En revanche, si l’on joue le tranquille 2…Rg7 pour mettre le Roi à l’abri, alors les Blancs n’arrivent pas à trouver de contre-jeu.

Typiquement, pour continuer à faire des échecs, on peut jouer 3.Ff8+ Rg8 et le Roi noir est à l’abri, ce qui se recoupe avec l’autre ligne envisageable : 3.Ff6+ Rg6 4.Tfd1 (pour faire de l’air) Dxh2+ 5.Rf1 Dh1#.

En fait, en se collant au Fou, le Roi évite tous les échecs et il évite de couper la connexion entre la Tour et la Dame, ce qui permet de mater.

Problème 3

L’essai 1.Dh8 est intéressant car sur 1…Rg2, 2.Ce3 mate et sur 1…fxe2, 2.Dh1 gagne. Le problème est que sur 1…Rxe2, il n’est pas possible de mater. En revanche, des essais comme 1.Df6 Rxe2 2.Da6# mettent la puce à l’oreille.

La solution consiste en un mix des deux tentatives. 1.Dh6 est le premier coup. Si 1…fxe2, 2.Dh1# ; si 1…Rg2, 2.Ce3#. Enfin, sur 1…Rxe2, le joli coup de côté 2.Da6# résout le problème.

Problème 4

Le Roi noir est extrêmement vulnérable mais, curieusement, le mater en 2 n’est pas simple.

1.bxc5+ Dxc5 ; 1.Cab5+ Rxc6 2.d5+Txd5 ; 1.Ccb5+ Re6 ; 1.Cc8+Txc8 2.Td7+ Rxc6 ; 1.Td7+ Txd7 2.Cc8+ Rxc6 sont autant d’essais insuffisants.

En fait, comme le Roi noir est très exposé, il n’est pas nécessaire de lui faire échec tout de suite pour le mater. On a le temps de se rapprocher de lui juste avant d’asséner le coup final.

En l’occurrence, c’est le très subtil 1.De3 qui permet de mater en seulement deux coups. Les menaces sont de jouer 2.Ccb5#, 2.Txf6# et 2.dxc5#.

La Dame est mise trois fois en prise. Pourtant, il n’y a pas une seule manière correcte de la capturer.

Sur 1…Dxe3, la Dame est déviée et 2.bxc5# est maintenant possible.

Contre 1…Cxe3, le Fou est libéré pour protéger c6 et 2.Cab5# termine la partie.

Enfin, sur la prise du pion, la colonne f se déblaye : 1…fxe3 2.T2xf6#.

Sur d’autres coups, l’une des trois menaces 2.Ccb5#, 2.Txf6# ou 2.dxc5# permet de finir.

Problème 5

L’essai 1.Dc4 visant à mater en g4 est infructueux car les Noirs peuvent entraver la route de la Dame en jouant 1…e4. Il en va de même pour la tentative 1.Dd3 cherchant à mater en h7.

Jouer 1.Tc8 en espérant que le Fou bouge pour aller mater en h8 est insuffisant car les Noirs peuvent encore une fois tout simplement répondre 1…e4.

Il peut sembler impossible de se rapprocher du Roi noir en deux coups. Pourtant, le coup 1.Db5 réussit cet exploit.

Si le Cavalier bouge, alors 2.De8# conclut.

Et dans le cas où le Fou bouge, 2.Th8# mate.

Enfin, sur 1…e4, 2.Cf4# profite du clouage du pion g5 pour finir brutalement la partie. Il se passe la même chose sur 1…g4.

Problème 6

Pour achever le Roi noir en 3 coups, il faut déjà faire l’inventaire des configurations permettant de le mater.

Si le Cavalier en c1 bouge, mettre la Tour en d3 matera ; déplacer le Cavalier de e5 jusqu’en a4, b5, d1 ou e4 permettrait de mater ; placer le Fou en e1 (si le Cavalier g2 disparaît), d2 ou e5 pourrait offrir l’opportunité de mater.

Il faut aussi identifier les défenses des Noirs. L’idée principale des Noirs pour éviter le mat en 3 va être de sacrifier leur Cavalier en b3 pour donner de l’air au Roi.

Après réflexion, le coup 1.Cxf7 est très intéressant car il ouvre la route pour jouer 2.Fe5# et en plus cela supprime le pion f, donc les Noirs ne peuvent plus jouer 1…f6 pour contrôler la case e5.

Les Noirs doivent donc prendre des mesures pour empêcher le mat en e5. Parmi les essais, on peut citer :

• Jouer la tentative désespérée 1…Cf4 ne mène à rien à cause de 2.Fe1#.
• Prendre la Tour par 1…Fxd5 ne sert à rien puisque 2.Fe5# mate toujours.
• Sauter en d3 avec 1…Cd3 dans l’espoir de contrôler e5 offre juste l’occasion de faire 2.Txd3#.
• Tenter 1…Cxb3 est intéressant mais 2.Td3+ Rxc4 3.Cd6# conclut en trois coups.

La meilleure tentative consiste en 1…hxg3 pour supprimer le Fou. Alors, 2.Cfd6 va mater car il n’y a pas moyen d’empêcher 3.Cb5# et 3.Ce4# en même temps. Et sur 2…Cxb3, 3.Td3# termine.

Problème 7

Le Roi noir est coincé et on aurait envie de jouer 1.Fg3+ ou 1.Cf5+ pour mater, mais la Tour en g5 est en l’air.

Jouer 1.Ff4 pour soutenir la Tour en vue de faire 2.Cf5# n’est pas assez malin car les Noirs ont 1…Da8+ (ou 1…Da7+ ou 1…Da6+) 2.Rb1 Da1+ 3.Rxa1 pat.

Sur 1.Ce6, la situation serait dramatique car après 1…Da6+, les Noirs renversent le cours de la partie puisque sur 2.Rb1, il y a 2…Dxd6, et sur 2.Fa3, il y a 2…Dxe6. Et le problème est que le Roi et les pions blancs sont trop faibles.

Un essai très amusant est 1.Fe7 qui menace également 2.Cf5# et braque en même temps le Fou sur le Roi. L’idée est que 1…Dxe7 se heurte à 2.Cf5+ Rxg5 3.Cxd7 et le Cavalier va être suffisant pour récupérer des pions noirs (par exemple Cd5/Cb6/Cxc4 est inarrêtable, puis Cd2 fait une fourchette sur b3 et e4).

Le problème de 1.Fe7, cependant, est que les Noirs ont 1…Da7+. Si l’on joue 2.Rb1, 2…Da1+ 3.Rxa1 fait pat comme tout à l’heure. En revanche, il y a 2.Ta5+ qui semble écrasant. Même 2…Dxe7 ne marche pas car l’on dispose toujours de la fourchette 3.Cf5+ Rg4 4.Cxe7. Toutefois, le petit pas de côté 2…Rg4 nous met en difficulté de manière surprenante! En effet, sur 3.Txa7, il y a pat. Et si l’on ne mange pas la Tour, maintenant que le Roi est en g4 et qu’il n’est plus sur une case noire, les tactiques fonctionnent moins bien…

Il faut donc trouver une autre manière de gagner.

En gardant à l’esprit les idées à base de Fe7, on peut tenter 1.Tg3 avec l’idée de faire 2.Fe7+ Dxe7 3.Cf5+ Rh5 4.Cxe7. Néanmoins, les Noirs ont une autre jolie ressource dans cette configuration. Ils ont 1…Da7+ (ou 1…Da6+ ou 1…Da8+) et sur 2.Fa3, 2…Dxa3+ 3.bxa3 b2+ 4.Ra2 b1=D+ 5.Rxb1 pat.

Pour éviter ce scénario, il convient de jouer 1.Tg1 de sorte que sur 1…Da7+ 2.Fa3 Dxa3+ 3.bxa3 b2+ 4.Ra2 b1=D+ 5.Txb1, les Noirs peuvent jouer 5…Rg5 et il n’y a plus pat.

Culture échiquéenne

Et maintenant, voici les réponses aux quelques questions de culture.

La question technique :  Les cadences pour lesquelles l’on bénéficie d’un rajout de temps à chaque coup sont les cadences Fischer.

La question historique : La partie officielle la plus longue a duré 269 coups. Elle s’est déroulée entre Ivan Nikolic et le MI Goran Arsovic en 1989 (Nikolic-Arsovic, Belgrade (1989)), se soldant par une nulle.

La question ouverture : 1.e4 e5 2.Cf3 Cc6 3.Fb5 d6 est la variante Steinitz de la partie espagnole.

Jean Meunier-Pion

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