Exercices tactiques 07 (par Jean Meunier-Pion)

Problèmes tactiques

N° 7

Si tu veux te creuser les méninges sur des problèmes qui se laisseront difficilement saisir, voici une petite sélection qui te fera plaisir.

La planche d’exercices est composée de 7 problèmes retors, aux différents ressorts.

Le niveau de difficulté augmente au fur et à mesure, alors ne perds pas d’allure.

Notes : l’orientation de l’échiquier est toujours du côté du camp au trait.

Problème 1

Pour se mettre en jambes, voici un problème où les Cavaliers noirs forment un méli-mélo défensif. Mate en 3 sans te prendre les pieds dans le tapis.

Problème 2

Dans cette finale, les Noirs menacent d’aplanir la position en prenant le pion en c7, et celui qui est en h2 attire l’œil de la Tour blanche. Comment parviens-tu à forcer le gain avec les Blancs ?

 

Problème 3

La situation dans ce diagramme est à double-tranchant. Tu dois porter l’estocade au Roi noir en 4 coups avant qu’il ne se rebiffe.

Problème 4

Je te propose à présent de plancher sur un problème que j’ai composé et dans lequel, bien que dépourvu de Dame, si tu arrives à manœuvrer élégamment tes pièces, tu peux gagner avec les Blancs.

Quand tu auras résolu ce problème, je t’invite à réfléchir à cette question : comment les Noirs pourraient-ils se défendre s’il n’y avait pas de pion en d3 dans ma composition ?

Problème 5

J’ai atteint cette position au détour d’une partie. Ici, ta mission est de finir l’attaque de mat avec les Noirs en au plus 7 coups.

Problème 6

Avec un Fou de plus, les Noirs aimeraient bien pénétrer le camp adverse. Cependant, le Roi blanc a encore un tour dans sa poche pour sauver la partie et faire nulle. À toi de trouver lequel.

Source : M. G. Kliatskin, Schachmatny, 1925

Problème 7

Pour finir, je te propose de trouver un moyen de faire nulle avec les Blancs dans cette position. La Dame est la dernière pièce blanche à se battre, mais elle peut encore produire un miracle.

Culture échiquéenne

Après avoir traité tous ces problèmes difficiles, je te propose des questions plus faciles. Ce sont des questions de culture, que ce soit d’ordre technique, historique, ou au sujet des ouvertures.

La question technique :  À quel outil échiquéen Eugene Nalimov a-t-il donné son nom ?

La question historique : En quelle année a eu lieu le premier tournoi des candidats ?

La question ouverture : Quel nom porte la variante de l’Est-indienne caractérisée par les coups 1.d4 Cf6 2.c4 g6 3.Cc3 Fg7 4.e4 d6 5.Cf3 0-0 6.h3 ?

Jean Meunier-Pion

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Solutions exercices tactiques N° 6

Que tu penses avoir trouvé la solution à un problème ou que tu t’arraches les cheveux depuis des jours sur une position, c’est ici que tous les mystères te seront révélés. 

Mais avant d’aller regarder plus loin, es-tu sûr d’avoir bien réfléchi sur le problème dont tu vas regarder la solution ? Une fois la solution dévoilée, tu n’auras plus de deuxième chance pour connaître la satisfaction que l’on ressent en perçant les mystères d’une énigme pour la première fois.

Aussi, petit conseil avant que tu ne consultes les solutions : quand tu lis des variantes, il ne faut pas être passif et juste regarder les coups. S’il y a une variante que tu n’avais pas vue ou que tu avais rejetée, il faut que tu comprennes chacun de ses coups et que tu la remettes en question en proposant tes propres lignes, jusqu’à ce que ce que tu réalises pourquoi elle fonctionne effectivement. Bien souvent, ce sont les sous-variantes que l’on calcule et qui n’apparaîtront jamais sur l’échiquier qui font la richesse de la ligne principale.

Problème 1

Dans la variante Cambridge-Springs, après les coups 1.d4 d5 2.c4 e6 3.Cc3 Cf6 4.Fg5 Cbd7 5.cxd5 exd5 6.Cxd5, les Blancs qui ont été trop gourmands souffrent d’une indigestion après 6…Cxd5 7.Fxd8 Fb4+. Ils n’ont que leur Dame et doivent parer l’échec par 8.Dd2 Fxd2+ 9.Rxd2 Rxd8. On a donc gagné une pièce, contre un pion, avec les Noirs.

Problème 2

Les Tours sont là pour contrôler les cases de repli c1 et e1, donc elles doivent rester sur la première rangée. Le Cavalier ne peut pas faire mat car, même s’il arrive en c4 ou en e4, le Roi noir aura toujours la case c3 ou la case e3 pour s’exfiltrer. Il faut donc a priori mater avec la Dame.

Comme la Dame noire contrôle la colonne où se trouve le Roi noir et que les pions f4 et b4 bouchent les diagonales de la case d2, il faut croire que le mat passera par une attaque sur la seconde rangée.

La solution passe effectivement par 1.Da2 qui menace maintenant 2.c3# ou 2.c4#. Déjà, 1…b3 2.cxb3# finit la partie. Si les Noirs tentent 1…De6, 2.c4# s’impose pour couper la connexion avec la Dame. Et sur un coup comme 1…Dd4, on joue 2.c3# pour éviter toute interposition à base de 2…Db2.

Ce problème n’a qu’une solution car le coup symétrique 1.Dg2 est empêché par 1…Ch4.

Problème 3

J’avais conçu ce problème juste pour que le premier coup de la solution soit 1.Dh6. Cela m’avait conduit à placer plein de pions blancs en a3, c6, d4 et e4 pour éviter des solutions faciles. Ainsi, des essais comme 1.Dc5 Rg8 2.De7 g6 , 1.Df4 Rg8 ou 1.Dg5 g6 sont trop lents. La tentative 1.Fh4 serait plus venimeuse mais les Noirs disposent de 1…h6.

La solution est donc 1.Dh6 gxh6 2.Fg3 Rg8 3.Fe5# et le Roi noir est dans nos filets. Sur 1…g6, 2.Df8# mate tout simplement. Aussi, sur 1.Dxh6 gxh6, 2.Fh4? ne fonctionnerait pas puisqu’il y aurait pat.

Problème 4

On aimerait bien jouer tout simplement 1.Dxc2+ mais 1…Td3 s’interpose solidement. L’essai 1.Df1 se heurte à 1…Tf2. Il faut donc approcher le Roi plus subtilement.

1.Dh1 a l’air subtil pour jouer 2.Fe4#, mais les Noirs ont par exemple 1…d5. 1.Cf7 a l’air encore plus subtil avec la menace presque imparable de jouer 2.Ch6#. Mais les Noirs peuvent créer une bulle d’air pour leur Roi avec 1…Ce6 2.Ch6+ Re5.

Avec quasiment la même idée que Cf7/Ch6, 1.Cf3 est un solide essai qui menace 2.Ch4# ou 2.Cd4# et, sur 1…gxf3, 2.Fh3# conclut. En revanche, la parade 1…Ce6 existe toujours.

La solution passe par le contre-intuitif 1.Cxc4 qui auto-cloue le Cavalier. La menace est maintenant le dangereux 2.Fe4#. Sur 1…Ce6, nous avons maintenant le joli 2.Tf7# à disposition. Si les Noirs jouent 1…d5 pour contrôler e4, ils ne contrôlent plus d5 donc on peut jouer 2.Te5#.

Par ailleurs, si les Noirs déplacent le Cavalier a4 pour protéger e4, ils vont couper des lignes. Ainsi, 1…Cc3 se heurte à 2.Cxe3# et 1…Cc5 à 2.Cxd6#.

Problème 5

La menace des Blancs sur la dernière rangée est beaucoup trop forte. 1…Tf8 est impensable car les Blancs ont alors l’initiative et un avantage matériel significatif après 2.Txf8+ Rxf8 3.Tb8+ Re7 4.Fb4+ d6 5.Dxg2. Et protéger la Tour par 1…De6 n’aiderait pas plus à cause de 2.Txe8+ Dxe8 3.Dxg2.

Il faut donc prendre des mesures dynamiques. 1…Fe4+ n’est pas bon car cela coupe l’action de la Tour et le Roi peut se mettre à couvert après 2.Re2 Dh5+ 3.Rd2 Dh6+ 4.Rd1 Dh1+ 5.Fe1.

1…Dg6+ ne marche pas non plus car la case d2 n’est plus contrôlée et le Roi peut remonter se mettre à l’abri après 2.Rd2 Dh6+ 3.Rd1 Dh5+ 4.Rc1 Dh6+ 5.Fd2 Dh1+ et les Blancs ont l’amusant 6.De1. La finale qui peut s’ensuivre après 6…Dxe1+ 7.Fxe1 Tf8 8.Txf8+ Rxf8 n’est pas forcément simple à conclure pour les Blancs, mais les pions noirs sont encore tous sur la ligne de départ et il suffit de développer les pièces, dont le Roi pour faciliter la conversion de l’avantage.

Enfin, 1…Dd6+ ne fonctionne pas car le Fou peut couvrir le Roi avec 2.Fd4.

Pour cette raison, il faut commencer par le coup 1…Ff1+ qui sème la zizanie dans l’organisation blanche.

Cette fois, sur 2.Rd4, on serait très heureux de pouvoir intégralement retourner la situation après 2…Dd6#.

Les Blancs doivent donc capturer le Fou. S’ils le capturent de la Tour, 2.Txf1 Dg6+ (important coup intermédiaire pour protéger f7) 3.Rd2 Txb8 4.Dxa7 Dg2+ 5.Df2 Dxf2+ 6.Txf2 Ta8 et les Noirs devraient avoir assez de pions pour compenser le Fou de moins. La position reste difficile à évaluer exactement, mais les deux camps ont des chances égales.

Si les Blancs jouent plutôt 2.Dxf1, alors on aura 2…De3+ 3.Rc4 et maintenant, bien que l’ordinateur indique comme équivalents les coups 3…De4+, 3…De6+ et 3…d5+, celui qui semble le plus fort est 3…De6+. En effet :

  • Si le Roi part sur la colonne b, il coupera la connexion entre les deux Tours et 4…Txb8+ sera un problème.
  • Sur 4.Rd4, 4…De4+ 5.Rc5 d6+ force le Roi à s’aventurer sur la colonne b, 6.Rb5 Txb8+.
  • Et sur 4.Rc5, 4…Dc6+ 5.Rd4 transpose dans la ligne du point précédent.

Les Blancs doivent donc jouer 4.Rd3 pour ne pas perdre l’avantage. 4…De3+ force 5.Rc4 et on répète les coups avec 5…De6+.

Problème 6

Tout l’enjeu dans ce problème est de ne pas pater le Roi noir.

Un essai intéressant est 1.Tg5 qui menace 2.Fg6#. Toutefois, les Noirs disposent de 1…g6 2.Rxe7 fxg5 3.Rf7 gxh5 et l’on a un temps de retard pour mater.

Une autre tentative qui vaut le coup d’œil est 1.Re8 Rh8 2.Rf7+ Rh7 3.Txg7#, mais les Noirs peuvent jouer 1…Rg8 2.Rxe7+ Rh7 et on a perdu deux temps : 3.Rf8 Rh8 4.Rf7+ Rh7 5.Txg7#.

On peut encore imaginer 1.Ce5 fxe5 2.Rxe7 e4 3.Rf7 e3 4.Txg7+ Rh6 5.Th8#, mais on constate être encore une fois en retard sur le mat en 4 tant espéré.

En fait, comme dans le Problème 3 de cette planche, quand j’avais conçu ce problème, j’avais une idée de sacrifice en h6 en tête. Ici, la solution passe par 1.Ch6 qui donne généreusement le Cavalier. S’ensuit 1…gxh6 2.Re8 Rh8 3.Rf7+ Rh7 4.Tg7#.

Problème 7

Attaquons directement la ligne principale de la solution. Pour percer le mur de pions qui sépare le Roi noir de la Dame blanche, une approche toute en finesse est possible en commençant par le joli 1.Db1. L’idée est de menacer 2.Cc3+ bxc3 3.Db7#. Par exemple, 1…Cf3 2.Cc3+ bxc3 3.Db7# et si les Noirs refusent de manger en jouant 2…Rc6, 3.Ce7# vient cueillir le Roi.

Si les Noirs anticipent les menaces et jouent 1…Rc6, 2.Ce7+ Rb5 3.Cc3# rend leurs efforts vains.

Se faire de l’air avec 1…c3 n’empêche pas de se faire mater car 2.Dxd3 rend la menace 3.Ce7# inévitable.

Jouer 1…Rxe4 ne suffit pas car la Dame qui a commencé le travail peut le finir à elle seule en translatant sur la première rangée :  2.De1+ Ce2 3.Dxh1#. Par ailleurs, 2…Rd5 3.Fb7# et 2…Rf3 3.Ch4# dissuadent le Roi de bouger.

Culture échiquéenne

Et maintenant, voici les réponses aux quelques questions de culture.

La question technique :  Le système Sonneborn-Berger est un système de départage qui consiste à calculer la somme des points des adversaires que l’on a battus et la moitié des points de ceux contre qui l’on a fait nulle.

La question historique : Le 11ème champion du monde d’échecs était Bobby Fischer.

La question ouverture : Les coups d4, Cf3, e3, Fd3, c3, Cbd2, 0-0 caractérisent le système Colle.

Jean Meunier-Pion

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